Climatisation : un confort croissant, mais un impact environnemental majeur
Alors que l’utilisation du chauffage en hiver ne suscite guère de débats malgré ses émissions de CO₂, la question de la climatisation en été apparaît plus controversée. En période de chaleur intense, le recours aux climatiseurs soulève en effet des interrogations quant à leurs effets sur l’environnement, comme le relève une enquête de Swissinfo.
Climatiseurs : entre confort thermique et enjeux climatiques
La demande mondiale de climatisation ne cesse de croître. Cependant, ces systèmes utilisent des gaz réfrigérants tels que les hydrofluorocarbures (HFC). Selon les experts, leur libération dans l’atmosphère contribue au réchauffement climatique. Le R-32, couramment employé dans les climatiseurs, présente un potentiel de réchauffement environ 675 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone (CO₂). Ces substances peuvent s’échapper durant l’utilisation ou lors de l’élimination des appareils.
À cela s’ajoutent les émissions indirectes dues à la forte consommation d’électricité. Plus de la moitié de l’électricité mondiale étant encore produite à partir de charbon et de gaz, le recours massif à la climatisation génère d’importantes émissions de CO₂. À l’échelle globale, ces appareils représenteraient plus de 3% des émissions de gaz à effet de serre, soit un impact comparable à celui de l’aviation.
Une consommation électrique exponentielle
Un climatiseur domestique consomme quotidiennement entre 3 et 7 kilowattheures d’électricité, soit environ cinq fois plus qu’un cycle complet de lave-vaisselle moderne, précise Cordin Arpagaus, chercheur à la Haute École spécialisée de Suisse orientale. D’après l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la climatisation et le refroidissement représentaient déjà près de 7% de la consommation mondiale d’électricité en 2022. Depuis l’an 2000, la demande d’électricité liée à ces usages a plus que doublé.
Une adoption mondiale en forte progression
Selon les données de l’AIE, plus de 2,5 milliards de climatiseurs sont actuellement en fonction à travers le monde. La concentration la plus élevée se trouve aux États-Unis, au Japon, en Corée du Sud et en Chine, où l’équipement en climatisation s’est largement accéléré depuis 2010. Aujourd’hui, environ un logement sur trois (36%) dans le monde est équipé. Cette proportion pourrait atteindre 60% d’ici 2050, avec une expansion particulièrement rapide en Inde, où le marché pourrait être multiplié par dix en une décennie. Des hausses marquées sont également attendues au Mexique, au Brésil et au Moyen-Orient. L’Europe affiche une progression plus modérée.
Facteurs socio-économiques et perspectives
La croissance du marché de la climatisation s’explique non seulement par la hausse des températures liée au changement climatique, mais aussi par l’augmentation des revenus dans plusieurs régions du globe. Hannah Ritchie, data scientist et chercheuse à l’Université d’Oxford, estime que dans de nombreux pays chauds comme l’Inde ou l’Indonésie, une partie de la population souhaiterait déjà utiliser la climatisation si elle en avait les moyens financiers.
Des situations contrastées selon les régions
Aux États-Unis, environ 90% des foyers disposent de la climatisation. Dans l’Union européenne, cette proportion atteignait 20% en 2019, selon l’Agence européenne pour l’environnement. En Suisse, aucun chiffre officiel n’est disponible, mais les estimations évoquent environ 5% de logements équipés. Ces écarts illustrent des réalités climatiques, économiques et culturelles très différentes selon les régions du monde.
Article basé sur des données de l’Agence internationale de l’énergie et de Swissinfo