Ententes sur les prix et marchés attribués à l’avance : le secteur de la construction neuchâtelois sous la loupe

Ententes sur les prix et marchés attribués à l’avance : le secteur de la construction neuchâtelois sous la loupe

Contexte et enquête en cours

Le secteur de la construction dans le canton de Neuchâtel est visé par une enquête de la Commission de la concurrence (Comco) depuis deux ans. L’institution soupçonne une vingtaine d’entreprises actives dans le génie civil et le bâtiment d’ententes illicites. Selon les investigations, ces sociétés pourraient avoir coopéré pour fixer des prix ou pour répartir des marchés publics, en décidant à l’avance quels appels d’offres seraient remportés et à quel tarif. Une pratique strictement interdite par la loi.

Évolution de l’enquête et portée sectorielle

Les investigations ont démarré fin 2023 avec des perquisitions dans plusieurs entreprises du génie civil. Le champ s’est ensuite élargi et la Comco porte désormais son attention sur le secteur du bâtiment et sur la fédération des entrepreneurs.

Chiffres et sanctions potentielles

Les contrats concernes se chiffrent en millions de francs et couvrent près de 350 chantiers communaux et cantonaux entre 2009 et 2024. En cas de constat d’ententes illicites, les responsables pourraient encourir des sanctions lourdes, les amendes étant plafonnées à 10 % du chiffre d’affaires des entreprises concernées. Quatre sociétés romandes ont été condamnées en septembre pour des ententes similaires.

Témoignages et contexte économique

Selon l’enquête du quotidien Arcinfo, certains entrepreneurs évoquent des ententes, en restant anonymes, et avancent une justification fondée sur une nécessité de survie économique. Certains parlent d’un système devenu intenable, dans lequel la concurrence est si forte qu’il serait venu le temps de recourir à des pratiques illicites.

Prix, influences locales et cadre légal

Des questions subsistent sur une éventuelle gonflement des prix et sur des liens étroits entre communes et entreprises locales pouvant favoriser une culture de favoritisme. Des témoignages font état de pressions sur certains entrepreneurs pour obtenir du travail, au risque de compromettre l’emploi et les recettes fiscales locales.

La fédération faîtière des entrepreneurs nie toute implication et demande le classement de l’affaire. Elle affirme que les prix pratiqués dans la construction neuchâteloise restent stables et compétitifs et que les collectivités ne seraient pas lésées.

Cadre légal et avis académiques

Selon Martial Pasquier, professeur à l’Institut de Hautes Études en Administration Publique (IDHEAP) à Lausanne, lorsqu des entreprises s’entendent sur les prix ou sur la répartition des marchés, le risque d’une augmentation des tarifs pour les clients publics et privés s’accroît. Le cadre légal relatif aux marchés publics demeure le point de référence pour évaluer ces pratiques.

Réactions politiques

Lors de l émission Forum, Martine Docourt, conseillère nationale socialiste neuchâteloise et ancienne députée au Grand Conseil, a qualifié la situation d’interpellante, tout en restant prudente tant que l’enquête est en cours. Elle a exprimé son intérêt pour les résultats finaux et pour savoir quelles communes pourraient être concernées, rappelant l’importance de respecter le cadre légal des marchés publics et la priorité donnée à l’emploi local.