Suisse: composants électroniques civils dans l’armement russe et enjeux du contrôle des exportations

Suisse: composants électroniques civils dans l’armement russe et enjeux du contrôle des exportations

Contexte et chiffres clés

Selon le renseignement militaire ukrainien, qui a analysé de nombreux débris d’armes russes, la Suisse figurerait au troisième rang des pays fournissant des composants électroniques pour l’armement russe, derrière les États‑Unis et la Chine.

La liste établie par les services secrets ukrainiens recenserait près de 5200 composants jugés essentiels à des systèmes de haute technologie. Trois entreprises suisses seraient citées, avec des pièces retrouvées à la fois dans des drones kamikazes et dans des missiles hypersoniques utilisés par la Russie.

Acteurs suisses et pièces identifiées

Parmi ces éléments figurent de nombreuses puces de STMicroelectronics, société basée à Genève. Interrogée par la RTS, l’entreprise affirme n’autoriser ni ne tolérer l’utilisation de ses produits au‑delà de leur usage prévu.

Réaction des fabricants

Une des entreprises concernées affirme même que certains composants incriminés auraient été extraits de voitures ou de trottinettes électriques avant d’être envoyés vers la Russie.

Provenance et réexportation

En dépit des sanctions, ces pièces conçues pour un usage civil se retrouvent dans l’armement russe. Le SECO précise que ces acquisitions se font principalement par l’intermédiaire de distributeurs établis dans des pays tiers qui ne se sont pas associés aux sanctions internationales.

Parmi ces pays figurent notamment la Turquie, la Chine, la Serbie ou le Kazakhstan, où les exportations de microélectronique ont fortement augmenté depuis le début du conflit en Ukraine. Certains de ces pays disposent même d’accords de libre‑échange avec la Russie, ce qui faciliterait des réexportations via des canaux de contournement.

Le SECO ajoute que les composants incriminés proviennent souvent de produits de masse à usage civil et industriel, qui ne présentent apparemment aucune caractéristique militaire. Il précise travailler en collaboration avec les entreprises concernées et les autorités ukrainiennes pour prévenir ces transferts.

Réactions et analyses politiques

Invité dans l’émission Forum, Fabien Fivaz, conseiller aux États Vert neuchâtelois, déplore une zone grise dans la législation et rappelle que le Parlement avait refusé de la durcir. Il indique que la Commission de politique de sécurité souhaite désormais aller plus loin en ouvrant les règles à toutes les exportations de matériel de guerre, pas seulement aux biens spécifiques ou à double usage.

Selon Nicolas Kolly, conseiller national UDC fribourgeois, la situation n’est pas conforme à la législation suisse et est problématique. Il rappelle que ces informations proviennent des services secrets ukrainiens et déplore l’absence de données sur l’armement ukrainien, ajoutant qu’il s’imagine qu’il y a tout autant de pièces suisses dans leurs propres machines et qu’il s’oppose à des interdictions d’exportation visant ces entreprises.

Dans le 19h30, Pascal Broulis estime qu’il serait dommage de mettre en péril l’industrie suisse pour des composants retrouvés sur des champs de bataille, rappelant qu’il ne s’agit pas d’armes en tant que telles.